25% des professionnels fumeurs : Les Hospices Civils de Lyon dégainent leur plan d’actions
Il y a un an pile, à l’occasion de la Journée sans tabac 2017, la Ministre de la Santé Agnès Buzyn affichait sa volonté de lutter contre le tabagisme des professionnels de santé, parlant d’"un problème spécifique dans notre pays", chiffres à l’appui : 31% de fumeurs chez les infirmiers et 44% chez les aides-soignants.
Avec une proportion moyenne de 25% de fumeurs actifs parmi leurs professionnels, les Hospices Civils de Lyon connaissent bien la problématique. Dès novembre, 2017 à l’occasion du Mois sans tabac, l’Institut de Cancérologie des HCL lance alors une vaste enquête épidémiologique sur les comportements liés au tabac. 35 000 questionnaires ont été distribués aux personnels, étudiants et patients du CHU, avec un triple objectif :
- Evaluer la prévalence du tabagisme au sein des HCL ;
- Identifier des facteurs prédictifs des comportements liés au tabac (ex. : liens entre tabac et travail ou études) afin d’identifier des "profils" de fumeurs ;
- Evaluer, en fonction de ces profils, les capacités des soignants à délivrer de l’information sur le tabac aux patients, sachant qu’un fumeur a 80% plus de chances d’arrêter s’il reçoit l’aide d’un professionnel de santé.
L’objectif final de cette enquête est de mettre en oeuvre un programme de lutte anti-tabac à l’échelle de l’institution, qui permette d’adapter le ciblage en fonction des populations, pour un sevrage tabagique plus efficace.
Quels résultats de l’étude ?
L’étude montre que la proportion de fumeurs parmi les personnels et les étudiants des HCL est plutôt moins importante que la moyenne nationale. Ainsi, chez les femmes cette proportion est de 23% dans le personnel et 26% chez les étudiantes contre 31% au niveau national. Chez les hommes, 30% des personnels et 26% des étudiants sont fumeurs contre 38% en France. L’étude permet surtout de définir les profils des fumeurs actifs :
- Au sein du personnel, ce sont plus volontiers des hommes, jeunes, de catégorie C, utilisateur de cigarette électronique et travaillant la nuit ;
- Parmi les étudiants ce sont les étudiants paramédicaux, jeunes, utilisateur de cigarette électronique ;
- Dans les deux cas le travail n’est pas considéré comme un facteur aggravant le tabagisme. Par contre, on note que le sentiment de pouvoir informer l’entourage ou des patients sur les dangers liés au tabac est associé au fait d’être non- ou ex-fumeur.
- De même, ceux envisageant un arrêt sont plus volontiers ceux ayant déjà essayé d’arrêter et ceux ressentant des symptômes attribués au tabac. Ces éléments sont importants pour identifier les cibles d’actions de prévention.
Le tabagisme des soignants et des étudiants aux HCL est moins important que dans la population générale. Toutefois, plus de 80% des personnels des HCL et des étudiants s’estiment capables de délivrer une information sur les dangers du tabac à leur entourage ou à des patients.
D’ailleurs, parmi les fumeurs actifs ayant déjà reçu un conseil de sevrage, ce dernier était délivré par des collègues ou des enseignants en majorité. Les conditions de travail semblent impacter marginalement le statut tabagique à l’exception du travail de nuit qui semble constituer un facteur de risque. Par ailleurs, les étudiants paramédicaux et les catégories C du personnel ont plus de risques d’être fumeurs. Dans l’étude, il apparait que 7% des personnels, 4% des étudiants et 6% des patients sont des utilisateurs actuels de la cigarette électronique. Ce sont très majoritairement des fumeurs actifs. Le profil de ces utilisateurs fera l’objet d’une analyse dédiée dans les prochains mois.
Zoom sur… le rôle des soignants dans l’arrêt du tabac chez les patients
Si le tabagisme des soignants est scruté de près, c’est également parce qu’il influence leur action préventive auprès de leurs patients. Or, comme dit plus haut, un fumeur a 80% plus de chances d’arrêter s’il reçoit l’aide d’un professionnel de santé. Dans cette enquête, 1563 patients ont été interrogés. Parmi les fumeurs, 35% ressentaient des symptômes liés au tabac et 61% déclaraient avoir envie d’arrêter. Une grande majorité (76%) rapportait qu’un soignant s’était enquis de leur statut de fumeur au cours de l’hospitalisation. Toutefois, seulement 32% s’étaient vu proposer un conseil d’arrêt, 31% des patchs de nicotine et 17% une consultation spécialisée alors que 36% étaient contraint d’arrêter à cause de leur hospitalisation.
Notre arme : le COLT
Les résultats de l’enquête servent de point de départ au projet d’une structure transversale commune de lutte contre le tabac aux HCL : le COLT ou Comité de Lutte contre le Tabac). Le COLT est missionné trois types de prérogatives :
Au niveau de l’Institution :
- Coordonner et mettre en oeuvre une politique collective d’information, de prévention et de lutte contre le tabac (en lien notamment avec les évènements nationaux type Mois sans tabac, journée mondiale contre le tabac…) ;
- Effectuer un suivi de l’efficacité de la politique de prévention et de consommation en substituts nicotiniques…
- Mener et coordonner une activité de recherche clinique autour de la thématique tabac.
Auprès des personnels et des étudiants :
- Mener des actions ciblées d’information et de prévention auprès des groupes identifiés à risque, en lien avec la médecine du travail et la médecine universitaire ;
- Proposer aux agents et étudiants des interlocuteurs formés en tabacologie
Auprès des patients, pour structurer l’offre de soin en tabacologie :
- Des infirmières référentes Tabac formées au sein de chaque unité de soin. Elles seront en première ligne pour détecter, informer et prescrire ;
- Des infirmières tabacologues présentes dans chaque groupement hospitalier des HCL proposeront des consultations d’initiation et de suivi des patients ;
- Un médecin tabacologue identifié sur chaque groupement pour traiter les cas complexes, permettant d’optimiser le recours aux ressources médicales dans ce domaine